|
| |
Bonjour.
Ici à Lille ça souffle bien, on voit voler des ardoises et on entend
passer les pompiers.
En relisant au chaud mes carnets de bord je constate une tendance à
toujour naviguer avec le courant, mais en négligeant l'effet que le
courant peut avoir sur le vent.
Le Lundi 2/9/02 à Guernesey (St Pierre), La météo annonce du NE F4,
localement et temporairement F5, et nous devons aller à Cherbourg.
Je feins d'ignorer qu'en Manche localement signifie Nord Cotentin ou
détroit du Pas de Calais, et puisque nous sommes en marée de mortes
eaux je pense pouvoir tenter le passage du raz vent contre courant sans
dégouter définitivement mon équipage de débutants.
Nous quittons donc St Peter très en avance, avec l'idée de refouler le
courant jusqu'aux abords du cotentin, puis de passer le gros du raz tout
au début du flot.
Le premier bord, tout dessus, tribord amures, nous emmène d'un trait
dans le sud des Casquets.
Le deuxième bord, babord amures, est plein Est et le courant nous
refoule au sud vers Dielette. En passant dans le sud d'Aurigny le vent
forcit F5 et il faut prendre un ris. Mais est ce le vent qui forcit, ou
le courant qui baisse et nous rajoutant quelques noeuds de vent
apparent ?
Le flot commence alors que nous sommes bien placés au milieu du raz,
donc on vire tribord pour franchir le raz courant au cul..
Le flot s'installe, on monte plein nord à 9 noeuds (au GPS), mais le
vent forcit encore et il faut prendre le 2ème ris, et même comme ça,
Solent + GV à 2 ris c'est un peu beaucoup.
Désagréable, mais c'était prévisible : 20 noeuds de vent (F5) + 9 noeuds
(bateau + courant) : 29 noeuds, le début de F7 !
En plus la mer devient franchement vicieuse, avec quelques déferlantes
qui arrivent sous le vent !
Heureusement quand l'Aphrodite gîte à 45° le cockpit ne peut pas retenir
beaucoup d'eau, mais on a les pieds humides !
Le bateau est fermé, tout le monde a capelé brassières + harnais, et
l'équipage est agrippé aux filières après s'être gavé de Nautamine.
J'essaie de maintenir le moral en plaisantant comme si tout était
normal, mais ils n'ont pas l'air très convaincus.
Il faut dire que le bateau retombe parfois avec une telle violence que
l'on peut craindre la dislocation.
Heureusement nous sommes vite assez au nord pour virer babord amures
vers Cherbourg. Maintenant la progression est visiblement très rapide
vers l'abri du port et l'équipage reprend des couleurs.
Au fur et à mesure que l'on se rapproche de Cherbourg la mer se calme,
et le vent baisse.
On arrivera dans la grande rade honteusement sous-toilé, mais j'ai eu la
flemme de renvoyer pour les derniers milles.
Morale :
Le raz Blanchard au près, vent F5 contre courant ça passe encore en
mortes eaux, mais il ne faut pas espérer faire beaucoup plus.
L'effet du courant est tout aussi sensible, mais plus agréable, quand le
vent est faible, ou dans le sens du courant.
En allant de Cherbourg vers Jersey par petit temps de NW (début de brise
de mer ?) on part contre la fin du flot, au près sous génois, en
longeant la côte. Quand on arrive dans le raz au début du jusant le
vent disparait, puis tourne au sud quand le courant s'établit. On se
retrouve alors à tirer des bords dans le vent apparent crée par le
courant. Si tout va bien ça peut emmener jusqu'au NW de Jersey, où on
risque de rester un moment !
NB : je viens d'aller faire un tour à quatre pattes dans le chéneau pour
fixer un panneau de zinc épris de liberté.
Yvon.
--
NOUVEAU : Croisière du Vert-Galant en Irlande.
http://perso.wanadoo.fr/yvon.nedonchelle/irlande.htm
|
| |