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Bonjour,
La pêche ?...ce n'est pas l'envie qui manquait ! On avait acheté des lignes,
des "rapalas", des mouches, des hameçons, tout l'attirail, quoi. Il y a eu
quelques occasions particulières. Comme par exemple le jour où un cachalot,
dérangé en surface par notre étrave a cru bon vouloir sauter sur le pont à
la façon des acrobates qui sautent élégamment et en souriant sur une planche
à bascule pour envoyer leur collègue en l'air sur les épaules du troisième.
On était justement trois, avec mon équipier et le cachalot, mais je n'avais
pas envie de sauter dans les barres de flèches à pieds joints. Heureusement
qu'il s'est loupé ! La poële à frire n'était pas assez grande, de toutes
façons, on a filé en douce...en remontant précipitamment les lignes qui
traînaient depuis Fort de France et qui ne ramassaient que des sargasses,
qui ne sont pas une légende: il y en avait partout cette année-là.
La pince à linge qui nous prévenait d'une touche n'arrêtait pas de sauter,
on a fini par tout remonter.
Au cours d'une autre transat, j'ai vu des thons de belle taille nager sous
le bateau. On n'avait rien pour en attraper, ce jour-là ! Nos bricolages à
base d'épingles à nourrice et de fromage ont bien du les faire rigoler.
Des poissons pilotes nous ont également suivis pendant des jours et des
jours, dans les remous, juste sous la voute du bateau, à quelques dizaines
de cm. Jamais pu en pêcher un. Et puis pas trop envie de me mettre sur la
jupe avec un harpon pour tenter le diable: on peut toujours tomber à l'eau,
et le support habituel de ces poissons - d'ailleurs peu tentants mais il
faut goûter pour savoir - aurait très bien pu être planqué 50 m derrière, la
serviette autour du cou...Très peu pour moi: je ne me sens pas l'âme d'un
maillon intermédiaire de la chaîne alimentaire océanique.
Là où la pêche a été meilleure et sans risque, c'est dans les placards de la
cuisine. Mon coéquipier, cette fois-là, était suisse, donc mé-ti-cu-leux. Ce
lascar, désespéré des conserves, du riz, des haricots verts en boîte et de n
otre avitaillement pourtant excellent, a trouvé la brillante idée de
décortiquer des sardines à l'huile et de les passer à la poële. Incroyable
ce que ça peut ressembler à du poisson pêché ! C'en est, d'ailleurs, mais
par d'autes. C'est absolument délicieux. A essayer, je suis sérieux. Les
poissons volants, dans les Alizés exclusivement sont aussi très bons et
tombent tout seuls sur le bateau. Excellents, frits. Chair très fine, comme
de la sardine. Peu de chance d'en voir beaucoup sur un retour vers l'Europe.
Pour parler maintenant avitaillement, il ne faut pas s'en faire un monde. Il
faut par contre le prévoir dans le détail, jour par jour. Etablir la durée
probable de la traversée, en gardant une marge.
Et ne pas négliger tous les "à côtés": cake, raisins secs, biscuits,
chocolat, céréales. Le beurre se trouve en boîte, sous les tropiques, les
fruits sont excellents et voyagent assez bien sauf ces :-[£µ*!@! de bananes
! Délicieuses, elles le sont jusqu'à la 20 ème, à peu près. Après, on se
sent transformé en banane, on n'en peut plus de la banane, on HAIT le goût,
l'odeur même, de la banane, on a envie de les jeter par dessus-bord. L'ennui
c'est qu'elles mûrissent toutes en même temps, et qu'elles n'attendent pas.
Ecoeurant.
Attention aux oeufs qu'il faut surveiller. Le fromage supporte très mal la
chaleur. Malheur à celui qui a acheté une forme entière, genre "fromage
espagnol" ! Hop ! A l'eau ! Enfin, avant que tout le monde n'ait sauté à la
place du fromage, écoeurés par les effluves pestilentielles qui imprègnent
tout: si on tente de l'enfermer, il transpire et c'est horrible, si on le
laisse dehors, si on le met sur le pont il est salé en 24 heures et il sent
aussi.
Attention à l'eau: en garder en jerrycans pour éviter la contamination des
réservoirs, éventuellement. Les bouteilles d'un litre et demi rangées dans
les fonds s'usent très vite au roulis et se vident: on croit qu'on fait de
l'eau (c'est souvent +/- salé, dans les fonds), les crépines se bouchent à
cause des étiquettes décollées en purée, on n'a plus assez de "bonne" eau
car celle des réservoirs peut prendre une délicate odeur d'égoût atroce (cas
des bateaux stationnés sous les petites latitudes).
Penser aussi que les cancrelas adorent la voile, et particulièrement la
croisière au large. Il y en a qur tous les bateaux tropicaux, sans
exception. Malheureusement, ils ne savent pas faire le point, sauf celui de
ce qui vous reste dans les placards. Ils percent très bien les emballages en
cellophane et vivent dans les paquets, menant là une existence fellinienne
jusqu'au moment fatal ou le "clap" de la scène finale tombe sous la forme de
votre main rageuse qui les transforme en vilaine tache sanguinolente. Le
paquet de pain d'épice est foutu ou presque car ces sales bêtes pondent
partout, et se reproduisent à la vitesse "V", pire que des lap.....Oups !
Pardon ! Enfin, on s'habitue à tout.
Vive le large !
:-)
Eric.
genet <pierre.charlotte@libertysurf.fr> a écrit dans le message :
3CAD5E68.46F6D2C4@libertysurf.fr...
> Merci pour ta réponse. Il est toujours très intéressant de faire le lien
entre
> ce à quoi l'on doit s'attendre et ce qui se passe réellement. Donc merci.
Mais
> une dernière question peut-être:
> Est ce que vous avez pêché durant ce périple ?
>
> alf
>
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