|
| |
Encore un bouquin à lire au mouillage bercé par le roulis.
Malheureusement je ne suis pas certain qu'il soit encore disponible
chez l'éditeur, mon exemplaire date de 1957 !
Quelques extraits pris au hasard
A propos des fuites.
"D'où qu'elle vienne, l'eau qui entre dans la cabine fait une mauvaise
impression. Quand on sait tout le funeste attrait que la mer éprouve
pour les intérieurs de coque, la moindre eau qui suinte ou qui sourd
vous donne un malaise, et la nostalgie de l'étanche peut tourner à
l'obsession maniaque."
A propos de bout.
"Tout de même, il se trouva de quoi faire une amure de foc. Médiocre
filin un peu moisi, mais il ne faut pas se laisser intimider par le
moisi. Une chance : le filin était prêt à servir car il portait une
cosse dont la rouille avait bouffé un peu de chanvre, en échange de
quoi cet oxyde de chanvre donnait une heureuse impression de soudure
et d'adhérence intime comme si la fibre eût conclu avec le fer un
rassurant protocole de symbiose."
A propos de rhum.
"....eh bien ça y est, voilà le matelot qui tape dans le rhum comme si
le port était là avec ses bars et ses chipechandeleurs.
-- Ne vous énervez pas capitaine. Il y a malentendu.
-- Je dis une chose matelot, c'est que nous allons aux Sorlingues pour
faire du chanvre, et pas du rhum.
-- Entièrement d'accord capitaine, mais ne faut il pas respecter la
morale des anciens ?
-- ???
-- Au sortir de la cape, à ras bord le hanap.
Rien à redire à cela, sauf que l'authenticité du distique me semble
suspecte; mais comment le prouver ? Ce n'étais pas la première fois
que le matelot me balançait des dictons à l'appui de ses débordements.
Il a dû comprendre que je ne suis pas insensible à l'autorité de la
rime qui donne à n'importequelle ânerie l'accent des vérités
éternelles. En réalité je me demande si, pendant les quarts de nuit,
Collot ne forge pas laborieusement de faux proverbes millénaires pour
me soutirer des ponches indus. Je riposte :
-- Cassé la balancine, adieu la chopine.
Il réplique :
-- A douleur de gréement, bon tafia jamais ne ment.
Je me concentre une minute et je rétorque :
-- Jusqu'à Santander ne remplit ton verre.
-- Imprudence! Il n'est bon vin qui ne se pique en mer Cantabrique."
A propos de crayons.
"Nous en avons emporté une demi-douzaine, chiffre insuffisant. Pour
mettre la main en temps voulu sur un crayon, je conseille d'embarquer
un nombre correspondant à celui des jours prévus en mer multiplié par
deux ou, si vous préférez, autant de crayons que de litres de
vin.S'ils ne sont pas achetés en vrac, vous aurez soin de les
débotteler au départ de telle sorte que le lendemain, sans que vous
ayez eu à intervenir, ils se trouveront répartis en tous lieux propres
et impropres.Alors vous aurez toujours un crayon disponible, à plus ou
moins longue portée de la main, car il va de soi que le temps de
recherche s'accroitra de jour en jour."
Yvon.
--
Croisière en Ecosse, Baltique, Espagne :
http://perso.wanadoo.fr/yvon.nedonchelle/voile.htm
|
| |